Nazim Massamah, responsable Export de Corteco SAS : « Pour développer un produit, il est absolument primordial d’être présent sur le terrain »

Date:

Leader parmi les acteurs de l’étanchéité en Algérie et au Maroc, Corteco subit lui aussi les aléas du marché. Son credo : miser davantage sur la bague et s’orienter vers des applications allemandes alors que l’équipementier est historiquement très présent sur les véhicules français. Le point avec Nazim Massamah, responsable Export de Corteco SAS.

Quel bilan tirez-vous du marché algérien de l’étanchéité en 2017 ?

En 2017, le marché algérien s’est mal terminé, à partir du mois d’octobre. Concrètement, nous avons tous perdu 2 à 3 mois de chiffre d’affaires. Pourtant, l’année avait plutôt bien démarré. Mais au final, nous accusons un retard de l’ordre de 10% par rapport à 2016 et de 20% par rapport à ce que nous avions prévu de réaliser en début d’année.

C’est aux nouvelles lois sur l’importation qu’il faut imputer ce retard ?

Oui, mais c’est aussi un bien. Le souci en Algérie c’est le sur-stockage. Nos clients ont tendance à faire des commandes représentant des millions d’euros de stocks mais ce n’est pas forcément en rapport avec les commandes qui sont passées sur le terrain. Du coup, le bon côté de cette « mini crise » de la fin 2017, c’est que cela va assainir le marché. En effet, cela a permis d’ajuster voire d’augmenter les prix du marché, et cela nous fait repartir sur de bonnes bases pour 2018. D’autre part avec ces nouvelles lois, je pense que les commandes énormes de 500 000 ou 600 000 euros, vont disparaître. Désormais, les clients se limitent davantage à des commandes de l’ordre de 100 000 à 150 000 euros qui, sont, de fait, plus régulières. Enfin, pour l’heure, comme beaucoup de commandes ont été insatisfaites, il y a beaucoup de demandes donc il va falloir entrer davantage dans une stratégie de planification avec nos clients car il y a un mois de décalage entre la commande et sa validation.

Et le marché marocain quant à lui ?

Au Maroc, le marché est assez classique. Il fonctionne sans pour autant montrer de grandes perspectives d’augmentation. Pour notre part, nous pensons connaître encore une progression, d’autant qu’entre 2016 et 2017, nous avons réalisé une hausse de notre chiffre de l’ordre de 20 %. En revanche, contrairement à l’Algérie, le Maroc, comme d’autres pays d’Afrique du Nord ou d’Afrique noire, sont des marchés de spécialistes de la réparation moteur et de l’étanchéité. Tout le monde n’intervient pas naturellement sur ces pièces. C’est d’ailleurs pour cela que les bagues d’étanchéité sont plus simples à vendre dans ces pays que les joints de culasse.

Justement, quels sont les produits les plus vendus en rechange sur le marché de l’étanchéité ?

Historiquement c’est surtout le joint de culasse qui est connu en Algérie, tandis qu’au Maroc nous sommes surtout connus pour la bague d’étanchéité et les accessoires moteurs car nous jouissons de l’identité de Freudenberg et de sa notoriété. En revanche, depuis 1 ou 2 ans, cela change un peu car nous travaillons avec une chaîne de production en Italie sur la bague d’étanchéité, en proposant par exemple toutes les bagues qui correspondent à chaque moteur. Et ces actions portent leur fruit. Avant, nous vendions 90 % de joints et 10 % de bagues. Aujourd’hui nous sommes davantage sur un ratio de 80-20. Notre objectif est donc de maintenir le joint de culasse et d’augmenter le chiffre d’affaires de 30 % sur les bagues. De fait, en termes de nouveautés, nous lançons de nouvelles références de joint sur la Peugeot 301 et le Boxer par exemple, ainsi qu’une nouvelle bague d’étanchéité sur la Golf 5.

Quels leviers actionnez-vous pour vous démarquer de la concurrence ?

Se démarquer de la concurrence c’est renouveler les gammes, avoir un bon positionnement prix, un bon niveau de service et proposer des produits de qualité d’origine. L’origine du produit est également essentielle en Algérie et au Maroc. Nous, nous appartenons à Freudenberg, donc nous venons d’Europe, et cela nous donne une vraie valeur ajoutée aux yeux des professionnels locaux.

Pour ce qui concerne le développement de nouveaux produits, historiquement, Corteco est très présent sur les véhicules français. Désormais, nous essayons de développer une gamme plus large sur les véhicules allemands. Par exemple, en 2017, en Algérie, nous avons conquis deux nouveaux clients spécialisés dans la gamme allemande. Sur la gamme française nous avons 4 ou 5 clients et cela suffit. L’idée c’est d’avoir un réseau stable pour ne pas que nos clients se fassent la guerre entre eux. Au Maroc, il y a moins de concurrence car les acteurs agissent plus en local, sur leur propre région. Globalement, nous y avons donc plus de clients qu’en Algérie, sans que cela ne soit un problème.

Les professionnels locaux accordent-ils de l’importance à la présence de l’équipementier sur le terrain ?

Pour développer un produit, il est absolument primordial d’être présent sur le terrain, d’aller voir les garagistes, les distributeurs. Et cela est vrai surtout en Algérie, car le marché est un peu moins structuré et les clients ne font pas d’analyses de terrain si l’on n’est pas derrière eux. Au Maroc c’est un peu plus structuré, c’est vrai, mais en revanche, le travail de développement n’est pas aussi approfondi. En d’autres termes, les garagistes et les distributeurs nous remontent facilement les informations du terrain, ils demandent des prix, de développer tel ou tel produit, mais ils prennent moins de risques et ne se lancent pas vraiment sur des produits qu’ils ne connaissent pas.

Quelles sont d’après vous les perspectives de marché pour 2018 ?

Globalement, sur l’ensemble du continent, je pense que le marché devrait se maintenir. Certes, sur l’Algérie, les choses seront sans doute plus compliquées si l’on reste sur les tendances de fin 2017. Mais a priori, la loi a été assouplie sur l’importation de médicaments et l’on se dit qu’à tout moment, cela peut aussi être le cas sur les produits automobiles. Après évidemment, ce ne sont que des spéculations. Ceux qui ont des lignes de crédit vont s’en sortir mais ceux qui n’en ont pas ne pourront pas faire autant de commandes en continuant à payer cash. D’autant que désormais, les clients sont plus frileux et vont importer en priorité les produits qui se vendent bien et sur lesquels ils font de la marge. Or, l’étanchéité ne fait pas partie de ces produits prioritaires comme le sont les consommables de type filtre ou freinage.

Pour le Maroc, rien de négatif. C’est le pays sur lequel nous misons le plus avec l’Algérie. C’est un pays très stable sur lequel la devise ne bouge pas. C’est un marché tranquille et sûr et j’espère y réaliser au moins 20 % de plus par rapport à 2017 !

Ambre Delage

Hervé Daigueperce
Hervé Daiguepercehttps://www.rechange-maroc.com
Rédacteur en chef d'Algérie Rechange, de Rechange Maroc, de Tunisie Rechange et de Rechange Maghreb.

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici

Articles similaires
Related

Le Groupe Floquet Monopole : un modèle de l’industrie automobile du Maroc

Présent sur Automechanika Dubaï, trahissant des ambitions justifiées sur...

Misfat poursuit la diversification de ses activités et renforce encore ses investissements

Sur Solutrans, le salon phare des transporteurs, des constructeurs...

« On a besoin de l’Etat pour promouvoir le « Made un Morocco »

Echanger avec Adil Rais s’avère toujours très instructif. Le...

Mann+Hummel renforce sa position de leader en Afrique du Nord

Beaucoup plus visible depuis quelque temps Mann+Hummel n’a jamais...